En République démocratique du Congo (RDC), 13 millions de personnes souffrent d’insécurité alimentaire. Parmi ceux-ci, cinq millions d’enfants souffrent de malnutrition aiguë. Pourquoi une telle situation et comment y remédier ? Eclairage avec Hervé Verhoosel, porte-parole principal du PAM, le Programme alimentaire mondial des Nations unies.
Que se passe-t-il en RDC ?
"Les conflits interethniques dont la RDC souffre ont vraiment une implication très négative sur la sécurité alimentaire. Dans le nord-est du pays, par exemple, dans la province d’Ituri, il y a énormément de conflits entre deux ethnies — les Lendu et les Hema — qui ont créé des déplacements de centaines de milliers de personnes. Ils quittent leur village pour trouver de la sécurité soit dans la brousse, soit dans des centres urbains. Qui dit déplacements de personnes dit problèmes de sécurité alimentaire."
Comment ces personnes parviennent-elles à se nourrir ?
"Le problème c’est que, bien souvent, ces personnes partent sans rien. Il y a un besoin d’aide humanitaire et c’est pourquoi le Programme alimentaire mondial de l’ONU vient de décider de tripler son aide alimentaire pour les déplacés dans cette région. Des 116 000 personnes que nous aidions au niveau des déplacés, nous allons passer à 300 000 déplacés. C’est donc vraiment presque tripler le support dans cette province de quatre millions d’habitants qui se trouve tout à fait au nord-est du pays, donc à la frontière avec l’Ouganda."
C’est la plus grave crise que l’on connaît actuellement en Afrique ?
"Tout à fait. C’est en fait la seconde crise alimentaire la plus grave au monde après le Yémen. 13 millions de personnes sont dans une insécurité alimentaire. C’est donc quelque chose de très important. Les problèmes sécuritaires, mais également le problème d’Ebola ont une influence sur cette insécurité alimentaire qui, entre 2017 et 2018, a presque doublé.
Il y a aussi des maladies. Ebola est un problème réel : on note presque 2350 cas, dont plus de 1563 décès. Le Programme alimentaire mondial donne par exemple une alimentation particulière aux personnes touchées par Ebola, mais également à leur famille. C’est pour empêcher que ces personnes se déplacent et déplacent éventuellement la maladie. On ne veut pas que ces personnes-là aillent au marché ou aillent aux champs, donc nous nous assurons que ces personnes reçoivent quotidiennement de la nourriture. Mais ces problèmes d’Ebola nous apportent également des problèmes supplémentaires logistiques et sécuritaires dans la région et ça ne fait qu’aggraver la situation."
Vous êtes en tout cas en train de gérer la crise, mais il faudrait gérer le problème à la racine, non ?
"Oui, ça mettra sans doute des années et des années. Et pour cela, il nous faut bien sûr de l’argent. Nous avons pour l’instant un manque de 155 millions d’euros entre maintenant et la fin de l’année, donc c’est également un appel aux donateurs internationaux. Bien souvent, les crises comme celle de la République démocratique du Congo, qui existent depuis longtemps, sont un peu oubliées. C’est donc un rappel à la politique internationale ou à nos décideurs, à Bruxelles et ailleurs, qu’il ne faut pas oublier la République démocratique du Congo, où l’alimentation est un problème très important, un problème créé par l’insécurité, mais qui peut également créer de l’insécurité."
Le Programme alimentaire mondial reçoit-il aussi des financements de donateurs particuliers ?
"Nous recevons des financements de donateurs particuliers et de certaines entreprises. C’est quelque chose que nous commençons maintenant à développer, alors que l’Unicef le fait depuis des années."
Leave a comment