Cette réforme divise l'Europe du transport en deux blocs: d'un côté se retrouvent des pays de l'ouest qui dénoncent le dumping social de l'est - une forme de concurrence déloyale due à des normes sociales moins élevées, qui allègent donc le coût des chauffeurs routiers -, de l'autre ceux qui accusent l'ouest de vouloir maintenir un protectionnisme déguisé.
La réforme est compilée dans un "paquet mobilité". Elle touche notamment aux règles de temps de repos encadrant les travailleurs "détachés", ceux venant d'un autre pays de l'Union européenne. Déjà soumis aux eurodéputés en plénière en juillet dernier, le paquet avait été renvoyé en commission, où les élus doivent à nouveau prendre attitude ce jeudi.
La réforme ne va pas assez loin pour certains
En Belgique, les fédérations de transporteurs routiers apprécient certaines améliorations proposées sur les conditions de travail dans le secteur, comme le repos hebdomadaire normal qui devra être pris en dehors de la cabine, alors que de nombreux routiers passent une partie du week-end dans leur poids lourd arrêté sur un parking. Mais la réforme ne va pas encore assez loin aux yeux de certains, car des dérogations seront possibles si le parking autoroutier est suffisamment équipé.
Par ailleurs, un conducteur devra retourner dans son pays d'établissement au moins toutes les quatre semaines, sauf dans certains cas particuliers, prévoit la réforme.
Discussions autour du "cabotage"
En revanche, la Belgique n'apprécie pas un autre point de l'accord, portant sur le "cabotage".
Cette pratique consiste pour un transporteur à effectuer des opérations dans un pays où il est arrivé dans le cadre d'une livraison internationale. Entre deux séries de cabotage dans un autre pays, le transporteur devrait respecter une "période de carence" minimale de cinq jours, afin d'éviter que cette activité à l'étranger ne devienne quasi permanente, selon les termes de l'accord.
Or, actuellement, des camionneurs belges partent de Belgique conduire des marchandises par exemple en France, où ils font trois opérations de cabotage avant de rentrer le week-end en Belgique et repartir la semaine suivante, expliquait dernièrement encore le ministre fédéral des Transports, François Bellot. "Ce ne sera plus possible" si la réforme passe, selon lui. La France est en effet parvenue à imposer sa période de carence.
En revanche, la Belgique soutient la mise en place du tachygraphe intelligent qui permettra des contrôles plus fréquents du cabotage. Toutefois, les camions qui réalisent des transports internationaux ne devront en être équipés qu'à partir de fin 2024, une date qu'il conviendrait d'avancer selon certaines fédérations.
Si le paquet mobilité passe les écueils de la commission parlementaire jeudi puis de la plénière la semaine prochaine à Strasbourg, il devra encore être négocié avec le Conseil, avant que les deux instances ne se prononcent définitivement, peut-être avant les élections de mai.
Au Conseil, la Belgique continuera de s'opposer à cette modification sur le cabotage. Le poids de la Roumanie, qui a pris la présidence semestrielle du Conseil, pourrait être déterminant.
Ce lundi, des transporteurs ont organisé des barrages filtrants à différents postes-frontières (à Rekkem, près de la France, ou encore à Zonhoven et Meer, près des Pays-Bas) pour dénoncer les nouvelles règles de temps de conduite et de repos des conducteurs de poids lourds en Europe.
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