Les prix de l’immobilier en Belgique continuent d’augmenter, mais cette augmentation n’a rien de spectaculaire. Le dernier baromètre de la Fédération des Notaires livre pourtant a priori des chiffres qui peuvent sembler impressionnants. Si on compare le deuxième trimestre 2019 avec le même trimestre en 2018, le prix moyen d’une maison est aujourd’hui d’environ 10 000 euros plus élevé.
Mais il ne faut pas en conclure que 10 000 euros est l’augmentation moyenne du prix des maisons en un an en Belgique. En réalité, 10 000 euros, c’est la différence entre deux photographies du marché immobilier prises à un an d’écart lors de deux trimestres bien particuliers. Mais si on tient compte de plusieurs trimestres, et même des années précédentes, avec un temps de pause plus long pour prendre la photo, on obtient un indicateur plus pertinent de l’évolution réelle des prix. C'est ce qu'explique Renaud Grégoire, porte-parole immobilier pour la Fédération des Notaires : "Ce qui est intéressant au niveau des prix, c’est quand même de prendre des échantillons plus larges et de prendre par rapport à l’année écoulée pour constater qu’effectivement il y a quand même une hausse marquée, mais qui n’est pas aussi significative qu’on peut l’imaginer". Ce que l’on obtient, c’est donc non pas 10 000, mais en moyenne plus 4 300 euros sur un an ; c’est une progression de 2,1% de la valeur moyenne des maisons.
Si on regarde l’évolution sur cinq ans, de 2014 à 2019, le prix des maisons a augmenté dans l’absolu de 13%. Mais si on tient compte de l’inflation, cette augmentation du prix est de 5%. Retenons cela : 5% en cinq ans, c’est l’évolution de la valeur réelle des maisons belges. C’est honorable, et en même temps, c’est très loin d’être un rendement qui pousse à la spéculation. En Wallonie et à Bruxelles, les frais de mutation, dits les "droits d’enregistrement", sur chaque vente sont de 12,5% de la valeur du bien. Cela veut dire qu’en cinq ans, l’augmentation moyenne de la valeur des maisons n’a en fait pas compensé les frais légaux par les acheteurs. Le rendement éventuel d’un investissement éventuel tient donc plutôt aux revenus locatifs sur le long terme.
Spéculation?
Pourtant, l’activité immobilière est, elle, en grande forme : plus 7% de transactions par rapport à l’année dernière. En théorie, cela pourrait faire monter les prix, mais ce n’est effectivement plutôt pas le cas, dit encore Renaud Grégoire : "Ce qui est assez marquant, c’est de constater que cette grosse augmentation d’activité ne se traduit pas par une aussi grosse augmentation des prix, bien au contraire. Il y a des segments — par exemple les appartements en Région wallonne — qui se tassent et qui sont plutôt relativement nuls, voire avec une légère baisse, mais globalement les prix augmentent en moyenne de l’ordre de 1, 2 ou 3%". Pour lui, c’est le signe qu’en gros le marché est plutôt sain en Belgique. Pourtant, la Banque Nationale avertit régulièrement sur les risques liés au marché immobilier chez nous. Les banques, entre autres, sont fortement exposées au secteur, avec des montants d’emprunt et un nombre croissant d’emprunts, tirés par les prix à la hausse.
Ce qui est sûr, pour Renaud Grégoire, c’est que l’évolution des prix n’est pas due à de la spéculation : "La spéculation ne se trouve pas là derrière, c’est plutôt le fait que différentes personnes investissent, achètent un appartement par exemple, avec un crédit hypothécaire très accessible aujourd’hui. Le marché est quand même essentiellement aux mains des propriétaires. Bruxelles est peut-être un marché un peu particulier parce qu’il y a énormément d’investisseurs sur Bruxelles, mais globalement, dans la moyenne nationale, il y a environ 70% des propriétaires qui sont propriétaires de leur propre bien, de leur propre habitation. Ça veut donc dire que vous laissez un marché plus étroit pour les spéculateurs, et donc, effectivement, si bulle il y a, elle est beaucoup moins importante que dans d’autres segments. Quand vous avez un problème en Bourse, quand vous avez un krach boursier, tout le monde se rue évidemment pour vendre. Si demain le marché immobilier baisse, moi je dois quand même dormir dans ma chambre et je ne vais pas aller vendre ma maison parce que le marché immobilier baisse".
Cela ne veut pas dire que nous sommes tout à fait à l’abri d’une baisse brutale des prix de l’immobilier et cela ne veut pas dire non plus que certains biens — maisons ou appartements — ne sont pas surévalués aujourd’hui.
Leave a comment