C'est un ultime rebondissement sur le chemin chaotique du Brexit. Le vote du Parlement britannique sur cet accord arraché après 17 mois de négociations est reporté à "avant le 21 janvier". Alors que va-t-il ou que peut-il désormais se passer?
Tournée européenne express
En reportant ce vote, Theresa May espère pouvoir obtenir des "des garanties supplémentaires" sur le mécanisme permettant d'éviter le retour d'une frontière entre la province britannique d'Irlande du Nord et le reste de l'île, ce qui inquiète particulièrement les députés. Elle entame donc dès aujourd'hui une tournée européenne express pour tenter de faire fléchir les Européens, ou tout au moins obtenir une clarification ou une "note interprétative", comme on dirait en Belgique, pour ensuite revenir devant son Parlement.
Cet après-midi, Theresa May rencontrera les responsables européens Jean-Claude Juncker et Donald Tusk. Avant cela, elle s'entretiendra avec son homologue néerlandais Mark Rutte à La Haye et se rendra à Berlin pour échanger avec la chancelière Angela Merkel. Un sommet consacré au Brexit est également convoqué pour jeudi à Bruxelles. Mais cela ne veut pas dire qu'une renégociation est acquise pour le Royaume-Uni. "Nous ne renégocierons pas l'accord, y compris le filet de sécurité, mais nous sommes prêts à discuter de la manière de faciliter la ratification britannique", a annoncé M. Tusk dans un message sur Twitter.
Retour au Parlement britannique
Si elle obtient une avancée sur le texte du Brexit, la Première ministre britannique le soumettra alors à nouveau aux députés. Soit elle parvient à convaincre les députés, qui adoptent le texte, et une sortie ordonnée s'ensuit. Soit ils le rejettent et le gouvernement aura alors 21 jours pour indiquer ce qu'il compte faire. D'autres scénarios d'accord, tel celui sur le modèle de la Norvège, qui dispose d'un accès au marché unique sans être membre de l'UE, sont évoqués comme susceptibles d'obtenir le soutien d'une majorité de députés.
Si le texte est rejeté par la Chambre des Communes, une sortie du Royaume-Uni sans accord peut aussi être déclenchée le 29 mars 2019, date de la mise en œuvre du Brexit. Les relations économiques entre le Royaume-Uni et l'UE seraient alors régies par les règles de l'Organisation mondiale du commerce et une multitude de contrôles douaniers et réglementaires devraient être mis en place en urgence. Theresa May ne cache pas que le gouvernement britannique "accélère les préparatifs" en vue de cette hypothèse, redoutée tout particulièrement par les milieux économiques. Ce scénario-là entraînerait une nouvelle chute de la livre et plongerait les entreprises dans l'incertitude. Pénuries de médicaments, embouteillages monstres aux abords des ports, avions cloués au sol, perte de croissance... c'est le menu auquel les citoyens doivent s'attendre dans ce cas de figure.
En cas de rejet: la fin de Theresa May
Un rejet de l'accord sur le Brexit signifierait sans doute la fin de l'ère May à Downing Street, car elle pourrait être confrontée à un vote de défiance au sein de son propre Parti conservateur, où les candidats pour la remplacer ne manquent pas. Certains veulent renégocier avec Bruxelles, d'autres sortir sans accord. Mme May pourrait aussi démissionner si une écrasante majorité rejette son texte.
Une motion de censure contre le gouvernement pourrait également être soumise au vote du Parlement et aboutir, étant donné la faiblesse de la majorité d'une dizaine de voix sur laquelle s'appuie Theresa May. Elle conduirait alors à la formation d'un nouveau gouvernement dans les deux semaines, ou à l'organisation de nouvelles législatives, ce que souhaite le Labour, principal parti d'opposition.
Pas de Brexit?
Un nouveau referendum, c'est le dernier scénario possible. Mais la Première ministre a toujours fermement rejeté une telle consultation, souhaitée par bon nombre d'europhiles. Le Labour a prévenu qu'au cas où de nouvelles élections ne seraient pas à l'agenda, il pourrait se positionner en faveur de l'organisation d'un second référendum, une hypothèse qui pourrait alors disposer du soutien d'une majorité hétéroclite à la Chambre des Communes.
La mise en oeuvre d'un nouveau referendum prendrait toutefois des mois et repousserait alors la date d'un possible divorce. Mais rien ne dit qu'une telle consultation annulerait le Brexit, voté par 52% des Britanniques le 23 juin 2016.
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