Matteo Salvini, patron de la Ligue (extrême droite) et homme fort du gouvernement italien, a célébré samedi à Rome ses six premiers mois de gouvernement avec des milliers de partisans... et quelques gilets jaunes enthousiastes.
"L'Italie relève la tête", "Les Italiens d'abord", "Six mois de bon sens au gouvernement", proclamaient les immenses banderoles bleues de la tribune, sous un franc soleil. Sur la place, les organisateurs, qui avaient affrété trois trains et plus de 200 bus dans tout le pays, ont recensé 80.000 personnes tandis que la police italienne ne donne jamais d'estimation.
"Gloire à Salvini"
Accueilli avec les notes du célèbre "Vincero" (je l'emporterai), parfois interrompu par des "Matteo, Matteo!", reparti après un long bain de foule sur les notes de "Con te partiro" (Je partirai avec toi), M. Salvini cite Martin Luther King, Jean Paul II mais aussi un leitmotiv de Benito Mussolini -- "Tant d'ennemis, tant d'honneur" -- tout en réfutant "une quelconque nostalgie".
Même si la rumeur le dit prêt à lâcher ses partenaires du Mouvement 5 étoiles (M5S, antisystème) dès qu'il se sentira assez fort pour gouverner seul, le ministre de l'Intérieur désormais crédité de plus de 30% d'intentions de vote dans les sondages (contre 17% des voix en mars) promet que la coalition va tenir pour les cinq années de législature. "Tant qu'ils font avancer les choses, cela me va", approuve Luciana, une retraitée de 71 ans venue de Bologne (centre). "Ça irait quand même mieux sans l'aile gauche du M5S", assure Marco La Franca, gardien de nuit de 54 ans venu de Ligurie (nord-ouest). Comme beaucoup sur la place, il a longtemps voté pour Forza Italia, le parti de Silvio Berlusconi. Mais pour lui, le vieux milliardaire est désormais trop proche de la gauche.
Alors que le gouvernement est engagé dans un bras de fer avec la Commission européenne sur son budget résolument anti-austérité - rejeté à Bruxelles en raison de la dette publique colossale de l'Italie -, Matteo Salvini réaffirme son credo eurosceptique.
"Peur de rien"
"Si l'Europe se limite aux contrôles, aux mises sous tutelle, au spread (l'écard très surveillé en Italie entre les taux d'emprunt italiens et allemands), au 0,1% (de déficit) en plus ou en moins, cette Europe est destinée à faire faillite", assure-t-il avant de lancer à propos des discussions avec Bruxelles: "Nous n'avons peur de rien ni de personne". "Il faut absolument réformer l'Union européenne. Il faut un fort vote populaire en mai dans les 27 pays. Il y a trop de pouvoir dans les mains des banquiers, alors que les impôts, c'est nous qui les payons", approuve Pierre Orsone, professeur de droit et économie de 60 ans. Lui qui se présente comme "Salvinien plutôt que partisan de la Ligue" a enfilé un gilet jaune, tout comme Stefano Feliziani, chauffeur de taxi romain de 63 ans, qui se dit solidaire d'"un peuple en lutte contre l'usurocratie, le gouvernement des banques, la mondialisation de la pensée unique".
À la tribune, le dirigeant Salvini évoque aussi le mouvement français: "Qui sème la pauvreté récolte les manifestations, qui sème les fausses promesses récolte la réaction des périphéries et des campagnes". Pour Giuseppe Rida, policier de 47 ans venu avec sa femme et leur fils de 10 ans, "c'est une lutte qui doit se faire aussi ici, mais avec ce gouvernement, on est déjà sur la bonne voie".
Dans la foule, c'est surtout le tour de vis sécuritaire et antimigrants engagé par M. Salvini que ses partisans sont venus applaudir.,"Il a réussi à stopper l'immigration clandestine, c'est le premier qui arrive à tenir cette promesse", salue Gabriele Accornero, spécialiste de marketing en ligne de 49 ans vue d'Avigliana, dans une vallée alpine à la frontière française.
"Ce n'est pas du racisme, c'est juste qu'on ne pouvait pas se retrouver avec tous ces délinquants", insiste Luciana. Venue de Milan (nord) avec sa sœur et sa grand-mère, Sara, 16 ans, la tête ceinte d'une écharpe de la Ligue, explique: "J'ai peur de sortir avec tous ces gens dehors, ces étrangers qui violent et qui volent dans le métro".
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